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Démantèlement de "la Lande" de Calais : le tribunal ne retient ni traitements inhumains et dégradants, ni atteinte à la vie privée des migrants

Public - Droit public général
Pénal - Procédure pénale
24/10/2016
La mesure d'évacuation du site de "la Lande" à Calais ne porte pas d'atteinte grave et manifestement illégale au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains et dégradants (CESDH, art. 3), ni au droit à la vie privée et familiale (CESDH, art. 8) des migrants. Telle est la décision prise par le Tribunal administratif de Lille, le 18 octobre 2016.
En l'espèce, pour faire face à l'apparition et à la multiplication de squats, de campements et de bidonvilles occupés par des migrants, les autorités publiques ont décidé de créer à la périphérie de la ville un centre d'accueil et d'hébergement. Le centre est implanté sur le site dit "La Lande". La population de migrants présente sur le site a connu un accroissement spectaculaire, passant de 3 000 à environ 6 000 personnes. La partie sud du site de "La Lande" s'est ainsi trouvée progressivement occupée par de nombreux migrants, qui s'y sont installés dans des formes d'habitat précaire.

Depuis octobre 2015, plusieurs départs vers des centres d'accueil et d'orientation (CAO) ont régulièrement lieu. Début 2016, il a été procédé à l'évacuation de la partie sud du campement, pour des motifs d'ordre public. À cette occasion, un centre d'accueil provisoire de 1 500 places a été ouvert sur le site de "la Lande". Toutefois, à la suite de l'afflux massif de nouveaux migrants au cours de l'été 2016, portant le nombre de personnes présentes sur le site à près de 6 500 personnes, l'État a décidé d'accélérer la création des CAO et d'y orienter, selon le principe du volontariat, l'ensemble des migrants présents sur le site de "la Lande", avant de procéder au démantèlement du campement.

Les requérants demandent, notamment, la suspension de cette décision de démantèlement. Ils soutiennent que l'évacuation aboutirait à ce que les personnes ne pouvant, ou ne souhaitant, pas aller en CAO retombent en errance ou se dirigent vers des bidonvilles et, donc, que la mesure porterait atteinte aux droits des migrants à ne pas être soumis à des traitements inhumains et dégradants. Les requérants soutiennent, aussi, que l'opération constituerait une ingérence de l'État ni nécessaire, ni proportionnée dans le droit au respect de la vie privée et familiale des habitants du bidonville.

Sur la première violation alléguée, le tribunal rappelle, notamment, que l'objectif du démantèlement vise à faire cesser de tels traitements. Il rappelle également qu'il ne résulte pas de l'instruction que les conditions d'accueil en CAO ne permettraient par la prise en charge des migrants. Sur la seconde violation, le tribunal affirme, à supposer que les abris puissent être considérés comme des domiciles au regard de l'article 8 de la CESDH, qu'elle ne peut être constituée au regard des objectifs qu'elle poursuit. Le tribunal conclut, donc, au rejet des conclusions des requérants.
Source : Actualités du droit