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La semaine du droit immobilier

Civil - Immobilier
06/04/2021
Présentation des dispositifs des arrêts publiés au Bulletin civil de la Cour de cassation, en droit immobilier, la semaine du 29 mars 2021.
QPC – expropriation – indemnisation –valeur 
« La société Alter public a saisi le juge de l'expropriation d’une demande de fixation des indemnités revenant à M. C. X et Mmes B., E., M. et Y. X, à la suite de l'expropriation de plusieurs parcelles leur appartenant.
Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité
Par arrêt du 12 janvier 2021, la cour d'appel d'Angers a transmis une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :
« L'article L. 322-2 [anciennement L13-15 I] du Code de l'expropriation porte-t-il une atteinte injustifiée au droit de propriété, garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789, et qui exige une juste et préalable indemnisation de l'exproprié, en tant qu'il ne permet pas le bénéfice d'une indemnité accessoire, dans l'hypothèse de l'expropriation d'un bien, qui serait indivisible de sa revente ultérieure par l'expropriant ? »
Examen de la question prioritaire de constitutionnalité
La disposition contestée est applicable au litige.
Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
La question posée présente un caractère sérieux.
En effet, la règle d'évaluation des biens expropriés selon leur usage effectif à la date de référence et sans prise en compte des changements de valeur intervenus depuis cette date, lorsqu'elle est appliquée à l'évaluation d'un bien destiné à être revendu par l'expropriant dans des conditions déjà déterminées et lui permettant de bénéficier d'une plus-value certaine, est de nature à créer un déséquilibre entre les intérêts de l'exproprié et de l'expropriant, celui-ci étant protégé de la spéculation foncière qui aurait pu bénéficier à l'exproprié, tout en étant assuré d'en tirer lui-même profit.
Ces dispositions sont donc susceptibles, en l’absence d’une indemnisation spécifique dans une telle hypothèse, de porter atteinte à l'exigence selon laquelle nul ne peut être privé de sa propriété que sous la condition d'une juste et préalable indemnité.
En conséquence, il y a lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel ».
Cass. 3ème civ., 1er avr. 2021, n° 21-40.004, P *
 
 
Expropriation – biens – changement de valeur – spéculation foncière
« La société publique locale (SPL) Territoire d'innovation a saisi le juge de l'expropriation d’une demande de fixation des indemnités revenant à MM. A., M. et P. X et Mme J. X (les consorts X), d'une part, et à M. et Mme Y, d'autre part, à la suite de l'expropriation de différentes parcelles leur appartenant.
Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité
A l'occasion des pourvois qu'ils ont formés contre les arrêts rendus le 26 mai 2020 par la cour d'appel de Lyon, les consorts X et Y ont, par mémoires distincts et motivés, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :
« Les dispositions de l'article L. 322-2, alinéas 2 et 4, du Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique relatives aux modalités d'évaluation des indemnités d'expropriation, imposant d'apprécier la nature et l'usage effectif de l'immeuble à une date de référence très antérieure à la date de l'expropriation et interdisant de tenir compte des changements de valeur depuis cette date, sont-elles conformes à l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 en tant qu'elles ne distinguent pas selon que le bien exproprié a vocation à demeurer dans le patrimoine de l'autorité publique expropriante, ou qu'il est déjà avéré que ce bien exproprié sera revendu par l'expropriant au prix du marché, dans des conditions déjà connues lui permettant de réaliser une plus-value substantielle certaine au détriment des expropriés ? »
Examen de la question prioritaire de constitutionnalité
Les dispositions contestées sont applicables au litige, qui porte sur l'évaluation de l'indemnité de dépossession revenant aux propriétaires de biens ayant fait l'objet d'une expropriation pour cause d'utilité publique.
Elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
La question posée présente un caractère sérieux.
En effet, la règle d'évaluation des biens expropriés selon leur usage effectif à la date de référence et sans prise en compte des changements de valeur intervenus depuis cette date, lorsqu'elle est appliquée à l'évaluation d'un bien destiné à être revendu par l'expropriant dans des conditions déjà déterminées et lui permettant de bénéficier d'une plus-value certaine, est de nature à créer un déséquilibre entre les intérêts de l’exproprié et ceux de l’expropriant, celui-ci étant protégé de la spéculation foncière qui aurait pu bénéficier à l’exproprié, tout en étant assuré d’en tirer lui-même profit.
Ces dispositions sont donc susceptibles, dans une telle hypothèse, de porter atteinte à l'exigence selon laquelle nul ne peut être privé de sa propriété que sous la condition d'une juste et préalable indemnité.
En conséquence, il y a lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel ».
Cass. 3ème civ., 1er avr. 2021, n° 20-17.133 et n° 20-17.134, P *
 
 
*Le lien vers la référence documentaire sera actif à partir du 6 mai 2021
 
Source : Actualités du droit